Après avoir parcouru la Russie, l’Asie, l’Océanie, Frédéric Lemalet a été captivé - au sens premier - par le Tibet : captif de la beauté âpre de ses paysages, de la vie spirituelle de ses habitants qui répondait à son propre questionnement. Il est retourné régulièrement sur le plateau himalayen entre 2003 et 2009, y passant la moitié de son temps, partageant leur mode de vie, s’imprégnant de leur mode de pensée. Aussi s’est-il donné pour mission de faire connaître ce peuple et sa culture aujourd’hui menacée.
Le temps d’un hiver, il nous fait partager l’ordinaire de leur vie consacrée pour l’essentiel aux occupations religieuses et à la survie dans une nature aussi grandiose qu’inhospitalière. Loin de décrire le quotidien, il évoque ces deux pôles de leur existence à travers des tableaux dans lesquels l’intérieur s’oppose à l’extérieur, l’ombre à la lumière, le portrait au paysage, l’intime et le fragment au plan général qui inclut l’humain dans son environnement. Dans les habitations où règne un clair-obscur très pictural, des visages, des mains émergent de la pénombre ; y surgissent les nuances chaudes de la peau parcheminée des vieillard ou de celle plus délicate des enfants, les couleurs somptueuses des vêtements pourtant pauvres. Dehors, des tempêtes de neige, des rivières et des lacs gelés, des tentes battues par les vents sont captés dans de vastes panoramas où règne le blanc, où l’homme, malmené par les éléments, se trouve confronté à sa véritable place dans l’univers. C’est entre visages et paysages, vie intérieure et cycle naturel que se joue le mystère de l’identité et des aspirations spirituelles de ce peuple.
Jean-Christian Fleury
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