Remontant à plusieurs siècles, le culte du Bwiti est originaire de populations du Gabon central. Il recouvrait à la fois une vision de l’univers, un enseignement, une organisation de la société et une thérapeutique.
N’y accédaient que les hommes qui y avaient été initiés au terme d’un rite au cours duquel le postulant mâchait l’écorce issue de la racine l’iboga, arbuste au propriétés hallucinogènes, qui lui permettait d’abolir le temps et d’entrer en contact direct avec les ancêtres.
A partir de la fin du XIX ème siècle, une forme plus ouverte et universaliste du Bwiti s’est développée chez les populations Fang et au-delà du Gabon. Si l’absorption de l’iboga reste le moyen principal de l’initiation, cette version rénovée du culte s’adresse à tous : la cérémonie, jadis secrète est désormais publique. Cette vocation universaliste, fondée sur l’idée que tout homme peut entrer en contact avec l’au-delà, explique sans doute le succès du Bwiti et sa résistance face au progrès de la christianisation et de l’islamisation.
Emilie Chaix consacre principalement les reportages qu’elle effectue un peu partout dans le monde au patrimoine humain. Elle témoigne de la richesse des modes de vie et des croyances qui perdurent en dépit de la standardisation culturelle.
Lors des cérémonies nocturnes auxquelles elle a pu assister, elle a cherché à traduire l’intensité émotionnelle à laquelle concourent les chants, la musique, les danses, les lumières vivantes des torches et, bien sûr, l’état de transe des candidats à cette re-naissance qu’est l’initiation.
Par delà l’aspect spectaculaire de l’événement, c’est la mise en relation de deux mondes, le temps d’une nuit, qui se manifeste à travers les imbrications fugitives des ombres et des lumières.
Jean-christian Fleury
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