Exposition : Du samedi 26 juin 2010 au dimanche 29 août 2010
C’est en 2002, lors d’un séjour en Tanzanie, que Laurent Baheux, frappé par la beauté de la faune en même temps que par sa fragilité, entame un travail photographique qui va devenir au fil des ans un hymne à la vie sauvage et un acte militant en faveur de la préservation de la biodiversité.
Réalisées sur huit années dans plusieurs pays d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe, ses images dépeignent un monde préservé mais en sursis. Sa vision n’a cependant rien de béat et ne se résume pas à l’apologie nostalgique d’un éden perdu : le danger, la violence, la mort, s’ils ne sont jamais exhibés, dramatisés, semblent omniprésents et sensibles.
Issu du reportage et principalement de la photographie sportive, Laurent Baheux excelle à saisir le mouvement animal dans son contexte naturel en même temps que des portraits qui nous placent dans une étonnante proximité avec le sujet. Celle-ci ne tient pas qu’à l’emploi du téléobjectif : à travers la posture, l’expression, le regard, ces « visages » détachés de leur environnement nous confrontent à la pensée animale. Pourtant celle-ci nous demeure inaccessible et conserve son mystère, car l’auteur sait éviter cet anthropocentrisme qui entache tant de documentaires animaliers. Ces bêtes ne sont ni des objets - fussent-ils d’admiration -, ni des ersatz d’humains. La fragmentation des corps accentue cette intimité sensuelle : ce qui s’impose à nous, par-delà nos représentations et notre savoir, c’est le hérissement dru d’une crinière de lion, les crevasses tortueuses d’une peau de rhinocéros, la tension d’un muscle, l’inquiétude d’un regard ou l’abandon d’un ventre livré au soleil.
Laurent Baheux se dit influencé par Peter Beard, cet autre chantre de la nature africaine. Le choix du noir et blanc lui permet de sublimer la beauté des corps, d’éviter tout aspect anecdotique, de jouer de la force graphique qu’offrent les ombres, les silhouettes à contre-jour, les rayures des zèbres, les taches des léopards ; il s’amuse de la symétrie des postures dans lesquelles il surprend girafes, ou vautours, de répétitions formelles - la boucle formée par la queue d’un lion et par le cou d’une autruche - qui se prolongent parfois sur plusieurs images groupées en diptyques ou en triptyques.
La vision de Laurent Baheux oscille entre celle de l’animal générique saisi dans son environnement, perçu comme élément d’un système parfaitement régulé, et celle de l’individu surpris dans une vie privée qui semble échapper à la détermination de l’espèce. Il nous place ainsi au coeur d’un définition complexe de la condition animale.
J.-C. F.
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